Métropole lilloise - Notre compil’ 2018 des perles du tribunal
Du tac au tac
Chaque procès démarre par une phase d’instruction. Le président passe en revue les faits reprochés et la personnalité de la personne mise en cause dans un jeu de questions-réponses. La solennité de l’enceinte judiciaire, la fatigue ou la pression de l’enjeu contribuent parfois à des échanges absurdes ou poétiques.
Roule ma poule…
Un homme est jugé pour violence sur fond d’alcoolisme massif.
Le président : « Vous buvez ? »
Le prévenu : « Six cubis de 3 litres par semaine… »
Le président : « Vous travaillez ? »
Le prévenu : « Je suis chauffeur de bus. »
Cœur sur le carreau
Un homme est jugé pour violence conjugale.
Le président : « Quelle est votre adresse ? »
Le prévenu : « Rue du Cœur-Joyeux. »
Dessin Julien Lécuyer.
Dessin Julien Lécuyer.
Pas vu, pas pris
Un homme est jugé pour conduite sans permis.
Le prévenu : « Je venais d’avoir le code… J’ai pris la voiture pour aller fêter ça… »
Le président : « Heureusement que tout le monde ne fait pas comme vous… »
Le prévenu : « Pas vu pas pris, Monsieur le président ! »
Maux d’esprit
Un homme jugé pour vol se vexe.
Le président : « Il me semble qu’il manque des maillons à votre raisonnement… »
Le prévenu : « Vous dites qu’il manque des maillons dans ma tête ? »
Apprenti voleur
Un homme est jugé pour tentative de vol.
Le prévenu : « Je ne sais pas pourquoi je suis là… »
Le président : « Les policiers ne vous ont rien dit ? »
Le prévenu : « Ils m’accusent d’être une tentative de voleur mais je ne connais pas encore le code pénal par cœur. »
Optimiste
Un homme est jugé pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique.
Le président : « Vous rouliez avec plus de deux grammes d’alcool dans le sang… »
Le prévenu : « Et je suis très content de ne pas avoir eu d’accident. »
Rusé
Un homme est jugé pour conduite sans permis.
Le président : « Vous rouliez tous feux éteints… »
Le prévenu : « Pour ne pas me faire repérer, je n’ai plus mon permis. »
Vol ou citoyenneté ?
Un homme est jugé pour vol.
Le président : « Les policiers vous arrêtent au moment où vous refermez le coffre de la voiture… »
Le prévenu : « C’est pas du vol. C’est un geste de pure citoyenneté ! »
Rancunier
Un homme est jugé en récidive.
Le président : « Vous êtes déjà incarcéré pour une autre cause… »
Le prévenu : « C’est à cause de vous. C’est vous qui m’avez mis en détention le 28 juillet. »
Le président : « Je ne vais quand même pas vous présenter mes excuses. »
Dessin Clémence Labasse.
Dessin Clémence Labasse.
Un peu marteau
Un homme est jugé pour violence avec arme.
Le président : « Si vous ne l’avez pas frappé, comment expliquez-vous ses blessures ? »
Le prévenu : « C’est un accident. Il faisait des grands gestes avec un marteau et il s’est tapé sur la tête. »
Le président : « Vous êtes sûr ? »
Le prévenu : « Certain. Je serais lui, j’irais voir un psychologue. »
Brèves de prétoire
Dans le box des prévenus, la galerie de portraits est riche. À la barre défilent des contrits, des insolents, des indigents, des imaginatifs, des cabotins, des résignés…
Fataliste. Le père d’un prévenu : « Si mon fils retourne en prison, c’est la faute de ma belle-fille. À chaque fois qu’il conduit sans permis, elle rachète une voiture. »
Comptable. Un prévenu de violences conjugales. « Vous me dites récidiviste mais ça fait bien longtemps que je n’avais pas donné une claque à ma femme. Je dirais 2011, 2012… »
Rebelle. Un très jeune vendeur de stups : « Mes parents ne le savent pas. Dans ma famille, ils sont du genre à détester tout ce qui est illégal. »
Défaitiste. Un prévenu condamné vingt-trois fois pour conduite sans permis : « J’ai raté mon permis deux fois, ça m’a démoralisé alors j’ai laissé tomber. »
Reconnaissant. Un prévenu décrit son dealer : « Il avait un pull rose et une tête de gentil. »
Poète. Un prévenu qui joue sur les mots : « Je lui ai pas dit, «je vais te défoncer», c’est pas mon langage. Moi, mon style, c’est plutôt «je vais te n…, bâtard». »
Précis. Un prévenu arrêté sur l’autoroute et jugé pour conduite sans permis : « Quand ils m’ont arrêté, j’allais en Hollande. C’est là que j’achète mon herbe comme tout le monde. »
Séries-maniaque. Un homme jugé pour vol avec arme (un pistolet à fléchettes) : « J’ai fait le coup tout seul. Avec ma femme, on regarde souvent les émissions de police. »
Résigné. Un homme jugé en récidive de récidive : « Vous savez, j’ai passé treize années pleines en prison alors pour moi, c’est le train-train… »
Aventurier. Un prévenu jugé pour trafic de stupéfiants : « Si j’ai refusé de donner mon code de déverrouillage, c’est parce que j’ai des principes. Un téléphone, c’est personnel. »
Dans la manche des robes noires
Le juge questionne pour juger. Le procureur requiert au nom de la société. L’avocat plaide pour défendre. Et parfois les mots des robes noires se mettent à gambader…
La procureure Élodie Buguel : « On ne s’improvise pas dealer sans autorisation des caïds du coin. »
Me Jean-Yves Moyart : « Il n’a rien d’un extrémiste. Il a une barbe juste parce que, s’il la rase, il fait 12 ans… »
La procureure Emmanuelle Laudic-Baron : « Vous êtes bien la seule personne à Lille qui, après avoir passé tout un après-midi place Vanhonaecker, affirme ne jamais avoir vu de la drogue y circuler. »
Dessin Clémence Labasse.
Dessin Clémence Labasse.
Me Quentin Lebas : « Ce tissu de souffrance a servi de terreau à ses faits de délinquance. »
Me Frank Berton : « Si vous considérez que qualifier quelqu’un de corrompu n’est pas diffamatoire, vous ferez évoluer la jurisprudence. »
Me Julien Bensoussan : « Mon client n’est pas un méchant, il a la bêtise de sa simplicité. »
La procureure Aline Clérot (à propos des trafiquants de stupéfiants) : « Ces gens-là feraient des commerciaux exceptionnels s’ils choisissaient des circuits légaux. »
Le président Jacques Huard : « Vous avez refusé de répondre à l’enquêteur de personnalité en disant que ses questions étaient connes. Vous répondez aux miennes. Dois-je me sentir flatté ? »
Le président Bernard Lemaire : « Vous dites aux policiers «J’ai vu la voiture ouverte et une sacoche dedans. Je me suis dit, c’est un don de Dieu…» Vous savez, ici on appelle ça un vol. »
La présidente Audrey Bailleul : « Vous incriminez le destin mais ça fait cinq fois que le destin vous croise en possession de cocaïne. »
Sun 06 Jan 2019 05:35:37 AM CET - permalink -
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