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J'ai toujours habité Paris, je me décris souvent comme une Parisienne née à Téhéran. Je connais ses jardins secrets, les traces de son passé disséminées dans ses rues - les dalles de la guillotine rue de la Roquette, la tour Médicis du 1er arrondissement, construite pour l'astrologue Cosimo Ruggieri par Catherine de Médicis, seul bâtiment ayant mystérieusement survécu à deux incendies, la plus petite église de Paris se nichant dans un arbre au coeur du XVème arrondissement, le Palais-Royal lieu de naissance du siècle libertin - je connais ses cimetières, ses frontières, ses ruptures esthétiques. Ses cafés, restaurants, bars, jardins publics abritent ma vie sociale, ses théâtres et opéras des flots de souvenirs, ses cinémas - avant que la production cinématographique ne sombre dans la mélasse compassionnelle indigeste - réveillent la mémoire de mes premières fois. En résumé, j'aime cette ville.
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Alors quand je vois, depuis une dizaine d'années, le décor privilégié de ma vie depuis trente-sept ans se dégrader continuellement, quand je constate tristement ses rues devenir de plus en plus sales, son mobilier urbain formant une sorte de ZAD géante, ses jardinières chaotiques qui sont autant de pissotières, et ses pissotières des poubelles, ses routes un imbroglio de plots jaunes en plastique et de bloc de bétons, ses pistes cyclables comme autant de risques pour piétons, les rats se battant autour de poubelles éventrées, sans oublier la cacophonie née des embouteillages monstres, et le massacre de la rue de Rivoli, c'est peu dire que je suis en colère. La rue de Rivoli à elle seule justifierait de virer l'équipe municipale manu militari. Cette rue dont je connais chaque parcelle, cette rue voisine de mon ancien lycée Victor Hugo et où se dresse l'historique BHV où j'ai vendu des nappes pour financer mes études, cette rue est devenue un décor de film d'anticipation où Paris aurait été envahi par des extraterrestres et abandonné dans la panique de l'exode.
Paris est devenu une poubelle inesthétique et impraticable
Pourtant, il peut être toujours agréable de vivre à Paris. Si vous habitez dans le haut-marais (le nouveau nom de République) et que vous travaillez dans le 6ème arrondissement. Vous pouvez même vous rendre à vélo au travail. Vous pouvez même prendre du plaisir à vous balader sur l'Ile Saint-Louis, si vous détournez la tête au bon moment à l'approche des fameuses pissotières - bien que l'odeur persistante vous rappelle au bon souvenir d'Anne Hidalgo. Il faut aussi une sacrée dose d'aveuglement idéologique et une terrasse privative pour y être parfaitement heureux. Pour tous les autres, Paris n'est plus une fête, mais un combat quotidien. Un combat contre les nuisances, l'insécurité, la laideur.
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Ma colère monte d'un cran lorsqu'en réponse au hashtag saccageParis, Anne Hidalgo, parle de trumpisation des esprits, et renvoie toute critique à l'extrême-droite. Je suis donc une fasciste lorsque je constate que Paris est devenu une poubelle inesthétique et impraticable pour les piétons et les automobilistes, où l'arrogance des vélos se dispute au je-m'en-foutisme des trottinettes, combiné aux nuisances sonores nées des mille et un travaux inachevés. Le déni de la maire de Paris est proportionnel à sa propre trumpisation. Il y a quelques semaines, son adjoint, dont je ne parviens pas à imprimer le nom, malgré ses moult gesticulations pour exister, se prononce pour un confinement dur de Paris en promettant une improbable réouverture totale trois semaines plus tard. Il l'annonce à la radio et le relaye par un tweet. Il n'a fallu que quelques heures pour que le tweet disparaisse devant la levée de boucliers face à la bêtise de la proposition. Deux jours plus tard, Anne Hidalgo parle de fake news et accuse les médias fascisants.
Certitudes d'une équipe municipale qui pense être touchée par la grâce du Dieu Vert
En renvoyant toute critique à l'extrême-droite, la maire de Paris fait la preuve que ce qui l'intéresse est de préserver son étiquette écolo - certainement pas d'être au service des parisiens. La posture compte davantage que la réalité. La réalité, cette chose dérangeante, ce concept démodé, qui vient contrecarrer les certitudes d'une équipe qui pense être touchée par la grâce du Dieu Vert, sous prétexte de trois bancs recyclés posés n'importe comment sur des quais de Seine désertiques en semaine, tout en rasant les 25 arbres de l'îlot Netter-Debergue, un quartier vert du XIIème arrondissement, dont un cèdre de l'Himalaya de 18 mètres, pour les remplacer par de hideux immeubles d'habitation. Il paraît que les arbres étaient déjà morts, dixit le premier adjoint transparent à coups de tweet.
Pendant ce temps, le quartier Stalingrad est devenu un fumoir à crack à ciel ouvert où les hurlements succèdent aux violences, et le canal Saint-Martin un énième dépotoir, fréquentés par des bobos qui n'ont pas été élevés, juste nourris. Ne cherchez aucune logique dans ces choix ubuesques, observez seulement que la dégradation de Paris est proportionnelle à la radicalisation du discours benêt de sa Maire. Et imaginez le retour des touristes lorsqu'en 2043 nous en aurons enfin fini avec la pandémie. Imaginez leurs regards hagards, leurs mines confuses, leurs sourires gênés, leur compassion face aux rares parisiens, survivants du saccage méthodique de la ville qui fut un jour l'une des plus belles du monde.